On peut être maigre comme un coucou et avoir un taux de cholestérol au plafond. C’est ce qui se passe dans le cas d’hypercholestérolémie familiale, une affection très difficile à traiter.Mais l’arrivée d’un médicament issu des biotechnologies pourrait bientôt changer les choses.
Ce médicament c’est le mipomersen (MPM), ce qu’on appelle un antisens.
Son rôle c’est de faire diminuer la synthèse d’une substance, la lipoprotéine apoB par l’organisme.
Cette apoB sert de véhicule à une fraction de cholestérol, le LDL-Cholestérol (LDL-C) qui a la mauvaise idée de se déposer sur les vaisseaux sanguins et y favoriser la constitution de plaques d’athérome.
Chez certaines personnes, en raison d’une anomalie génétique, l’épuration de ce LDL-C est compromise et il n’est pas rare de voir des sujets jeunes, menant une vie normale, afficher des taux de cholestérol atteignant, voire dépassant les 4 grammes par litre avec toutes les conséquences cardiovasculaires imaginables. On compte d’ailleurs des décès précoces par infarctus dans ces familles, chez des gens très jeunes.
L’arrivée de médicaments comme les statines mais aussi des résines ont permis d’abaisser le taux de ce LDL-C, mais pas assez pour toujours arriver à des chiffres rassurants.
D’où l’idée de réduire l’importance du transporteur, l’apoB.
Pour cela, deux sociétés de biotechnologie, Isis et Genzyme, ont travaillé sur un concept appelé antisens. Un peu de tableau noir pour commencer.
Au sein du noyau de nos cellules, les gènes portés par l’ADN commandent une série de synthèses Leurs ordres sont transmis sous forme non pas d’ADN mais d’ARN dit ARM messager ou ARNm
Cet ARNm sous la forme d’un simple brin va aller se faire lire dans le cytoplasme de la cellule par une sorte de tête de lecture appelé ribosome
La lecture de l’ensemble de la commande aboutira à la synthèse d’une protéine, en l’occurrence ici l’apoB
Le but, pour freiner la quantité d’apoB disponible, c’est d’empêcher le brin d’ARNm d’être lu
Pour cela, on fabrique un brin d’ARN complémentaire qui va venir se coller au brin initial grâce à un message complémentaire et donc inverse de lui
C’est un peu comme si, au moment où vous voulez entrer un DVD dans votre lecteur, un second DVD identique vient se coller au premier, interdisant ainsi son introduction dans le lecteur
Utilisé sous forme injectable, le mipomersen a permis dans deux essais cliniques d’obtenir des résultats très intéressants
Ainsi, dans un groupe de 56 patients ave hypercholestérolémie familiale, traités pendant 26 de semaines soit par MPM soit par un placebo, on a obtenu une réduction significative du taux de LDL-C chez les patients recevant la molécule antisens
Ils sont passés, en moyenne de 2,72 g/l avant traitement à 1,75 g/l après traitement
Cela représente une réduction de 36 %, alors que chez les patients recevant le placebo en plus du traitement classique maximum, la réduction n’a été que de 13 %
Une deuxième étude conduite chez 158 patients ayant un taux de LDL-C élevé et un fort risque d’accident cardiovasculaire a montré des résultats également intéressants.
Le groupe traité a vu son taux de LDL-C baisser en moyenne de 37 %, la moitié des patients passant même sous la barre des 0,7 g/l.
Le groupe placebo n’a connu une réduction moyenne que de 5 %.
Mais le produit n’est pas pour autant une panacée et, en dehors des douleurs au point d’injection, il provoque des élévations du taux des enzymes hépatiques, traduisant par là une certaine toxicité
Cela signifie que ces données devront être prises en compte avant toute autorisation de mise sur le marché, car ce sont des questions de sécurité très importantes
La voie des antisens est étudiée depuis plusieurs années dans divers domaines de la médecine on y a beaucoup cru en cancérologie, sans aucun résultat réel pour l’instant
C’est peut-être dans la lutte contre les formes sévères d’hypercholestérolémie que cette technologie trouvera ses premiers débouchés
Pour en savoir plus :
Genzyme and Isis Report Results of Two Phase 3 Trials of Mipomersen
Mipomersen passes hurdle in two trials