C’est une association dont on savait qu’il n’y avait rien de bon à en attendre. La co-infection par les virus VIH et HPV est à l’origine d’un nombre croissant de cancers chez les personnes séropositives pour le virus VIH. Une nouvelle étude sur près d’un demi-million de malades le démontre avec force.
Les papillomavirus ou HPV sont des hôtes tout à fait indésirables, comme tous les germes sexuellement transmissibles. Mais à la différence de nombre d’infections sexuellement transmissibles, les contaminations par le HPV sont associées à un risque de survenue de cancers.
On le sait pour les cancers du col utérin, notamment grâce aux publicités des fabricants de vaccins, mais ces virus sont aussi impliqués dans des cancers du vagin et de la vulve chez la femme, des cancers du pénis chez l’homme, et deux formes de cancers en forte augmentation : les cancers de l’anus et ceux de la sphère ORL, notamment les tumeurs de la gorge.
La recrudescence des cancers de l’anus associés au HPV chez les personnes séropositives a amené depuis un certain temps les spécialistes à se poser la question du rôle de l’immunosuppression dans la genèse de ces cancers.
Dans ce qui est la plus grande étude réalisée à ce jour, des chercheurs de l’Institut national du cancer américain ont relevé les données de 499230 patients pour lesquels un diagnostic de Sida a été porté entre le 1er janvier 1980 et le 31 décembre 2004.Leur travail est publié dans le JNCI (Journal of the National cancer institute)
Ils ont comparé la survenue de cancers liés au HPV dans cette population par rapport à la population générale sur trois périodes : 1980-1989, 1990-1995 et 1996-2004, cette dernière période correspondant à l’introduction des traitements combinés, en particulier la trithérapie.
Ils se sont intéressés aussi bien aux cancers in-situ, c’est-à-dire limités à la couche la plus superficielle des tissus, qu’aux cancers invasifs.
Ce qui ressort de cette étude c’est la confirmation que la co-infection VIH-HPV augmente d’un tiers le risque de faire un cancer de la gorge.
Mais c’est surtout le risque de cancer de l’anus chez l’homme qui est majoré, multiplié par 2 dans sa forme invasive, c’est-à-dire la plus sévère.
Et le plus étonnant c’est que ce risque est plus important dans la période 1996-2004 que dans les deux autres, malgré le recours aux traitements combinés.
Les auteurs lient ce phénomène aux conséquences d’une immunosuppression prolongée qui rend les personnes infectées depuis longtemps par le VIH beaucoup plus vulnérables au virus HPV.
Cette étude qui confirme d’autres travaux implique qu’il faut que les médecins qui suivent des personnes séropositives pensent systématiquement à vérifier l’état de la sphère ORL dans les deux sexes et du canal anal plus particulièrement chez les hommes ayant des rapports homosexuels.
La question de la vaccination anti-HPV peut se poser chez des personnes jeunes séropositives pour le VIH et n’ayant pas débuté leur vie sexuelle.
Enfin il faut se rappeler que les cancers ORL liés au HPV répondent mieux aux traitements par chimio et radiothérapie que ceux liés au tabac et à la consommation excessive d’alcool.
Je vous le concède c’est une bien maigre consolation.
Référence de l’étude :
Anil K. Chaturvedi et al.
Risk of Human Papillomavirus – Associated Cancers Among Persons With AIDS
J Natl Cancer Inst 2009;101: 1 – 11